– Et donc, après un article sur Cinquante nuances de Grey, tu écris un article sur le Front National…Tu aimes bien le mauvais sado-maso en fait. Tu as raison personnage fictif, ça commence à devenir une thématique là. – Tu devrais appeler ton article « cinquante nuances de bleu (marine) ». Huhuhuhuhu ! Ok, ça serait marrant. Mais plus que du bleu, je dirais qu’il s’agit de cinquante nuances de brun…Là, d’un coup, ça devient vachement moins rigolo. Et les dernières élections ne portent pas à la franche rigolade. Au premier tour des départementales, le Front National est en tête dans 43 départements sur 98, dépasse la barre des 30% dans 21 départements, et obtiennent 25,19% des voix sur l’ensemble du territoire, derrière l’UMP et ses alliés (29,4%) mais devant le PS et ses alliés (21,85%) Manuel Valls peut sortir le cigare et s’auto-congratuler si ça l’amuse mais on ne peut pas considérer sérieusement que le FN arrivant à la seconde place au premier tour des départementales soit une victoire pour qui ce soit – à part pour le Front National lui-même. En effet, même si le résultat s’avère moins élevé que prévu – le parti de Marine Le Pen était alors donné premier par les différents sondages pré-élection – le premier tour des départementales a montré, qu’en plus de se renforcer dans dans ses bastions du Nord-Est et du Sud-Est – Aisne (38,67 %) ; Oise (35,1 %) ; Somme (34,23 %) ; Pas-de-Calais (35,63 %) ; Var (38,9 %) ; Vaucluse (37,40 %) ; Gard (35,54 %) – le FN a réussi à s’implanter dans des régions jusqu’alors plutôt imperméables comme l’Ouest, le Sud-Ouest et le Centre. Par exemple, sur l’ensemble du département Tarn-et-Garonne le FN est en tête avec 27,26% des voix, se maintient dans 12 cantons sur 15 et arrive en tête dans 5 d’entre eux. Même les différents dérapages– si on peut appeler ça des dérapages pour l’extrême-droite – des candidats FN n’ont pas empêché leurs passage au seconds tour, comme par exemple : Christian Benner, candidat FN en Côte-d’Or et qualifié au second tour avec 27,91%, qui avait écrit sur son Facebook le 17 juin 2014, alors qu’un Rom a été roué de coups en Seine-Saint-Denis [les fautes d’orthographes sont de C.Benner] : « et un romm de moin il n avait pas qua voler on en a marre de ces gent la et le gouvernement leurs donne le biberon a bas les guauchistes trosquiste » En mars 2014, le même Christian Benner avait « publié un photomontage de Marion Maréchal-Le Pen en cavalière, terrassant un dragon avec une étoile de David en guise d’œil«  Récapitulons : – Le Fn est second au premier tour des départementales – Il a réussi à renforcer ses bastions et à conquérir de nouvelles régions – Les dérapages de ses candidats n’influencent en rien le scrutin. Marine Le Pen avait de bonnes raisons de sourire ce dimanche 22 mars et il n’y avait vraiment pas de quoi se réjouir – avec ou sans cigare – ni du côté socialiste, ni du côté UMP. Les élections départementales ont souffert d’une méconnaissance, dû à une sous-médiatisation, des pouvoirs du conseil départemental, et du charcutage des différents cantons. Les échecs de la gauche sont aussi à regarder de ce côté-ci. Mais la poussée électorale du FN ne se limite pas à ces seules élections départementales. Les différents succès électoraux du Front national ont de quoi inquiéter surtout sur des élections locales. Au regard des décisions déjà prises dans les mairies d’extrême-droite (comme par exemple : « Un maire FN interdit un spectacle de danse orientale : « On est en Provence, pas en Orient« ), on peut redouter la place que feront les Conseils départementaux (ex-régionaux) Front national aux aides sociales, à la culture ou à la vie publique en générale. Pour contrer le vote Front National, les principaux partis politiques se sont alignés ces dernières années sur les deux grandes thématiques de ce celui-ci : la sécurité et l’immigration, légitimant ainsi la phrase de Fabius: « Le FN pose de bonnes questions mais apporte de mauvaises réponses« . Les cadres du Parti Socialiste ont choisi de ménager la chèvre et le choux : diaboliser à outrance le Front National, avec des slogans hyper percutants comme (en gros) « le racisme c’est pas bien », tout en reprenant certaines de ses thématiques au risque de trahir l’idéologie du parti (et de perdre ses électeurs-trices et militant-e-s). Une stratégie de perdant-perdant en somme. Les travaux du politiste Joël Gombin ont montré qu’un des facteurs du vote Front national était l’inégalité de la répartition des richesses sur un territoire. Pas l’immigration, pas la délinquance : l’inégalité. Plus les écarts de richesse sont importants sur un territoire, plus le vote Front national a de chance d’émerger. Or la stratégie du gouvernement Valls ne s’inscrit absolument pas dans cette dynamique : la loi Macron et l’ANI représentent les plus grandes casses sociales de ces dernières années et contribuent au renforcement des inégalités. Comme le disait si justement Naomi Klein sur twitter le soir de la victoire de Syriza en Grèce : « Lesson today from # Greece: How to beat the fascist right? Build a real left. » (la leçon d’aujourd’hui venant de #Grèce : Comment combattre l’extrême-droite fasciste ? Construire une vraie gauche ». Le FN ne se combat pas avec des formules toutes faites, des pin’s, ou des dubsmash, mais avec une vraie politique de répartition des richesses. Une politique de gauche en somme.   *** Comme ce blog est aussi (et surtout) un blog parlant de musique, je vais vous laisser avec cette magnifique chanson cathartique de Sexy Sushi  » J’aime mon pays » (2013) qui m’a aidé lors des manifs pour tous personne et les différents succès du Front national. Bon week-end électoral !